Aux Etats-Unis, la lutte contre l'avortement a pris une tournure résolument raciale, voire raciste, avec la campagne ci-contre, diffusée dans les 330 magasins de la marque Dillard's répartis dans trente états. La traduction est édifiante: "la place la plus dangereuse pour une afro-américaine, c'est dans un utérus". En ciblant explicitement une population, l'annonceur sous-entend que les femmes noires seraient plus enclines à l'avortement, oubliant les facteurs sociaux, notamment ceux liés à la pauvreté, aux conditions de vie, à l'éducation...
Une telle campagne – par son coût – atteste de la force dont disposent les lobbys anti-avortement aux Etats-Unis. Elle indique également que le racisme fonctionne comme argument. Dans le combat entre les "forces du bien" et "les forces du mal" d'une Amérique d'un autre âge, l'Autre est diabolisé (dans tous les sens du terme).
Ici, l'autre est l'Afro-américaine qui incarne le mal, par l'assimilation de l'avortement au meurtre. La petite fille en robe rose et au noeud dans les cheveux est présentée comme une survivante du corps des femmes noires. Dans un pays où la ségrégation raciale existait encore il y a moins de cinquante ans et où les droits civiques en faveur des Afro-américains ont été acquis de haute lutte, cette association est loin d'être anodine.
Elle joue sur les représentations les plus profondes du racisme qui associe les Noirs à une sexualité non contrôlée, bestiale, primitive... et au refus d'en assumer les conséquences. La campagne s'appuie donc sur les sentiments racistes les plus enfouis pour combattre un autre droit, celui à l'avortement, conquis lui aussi par les femmes ayant combattu pour obtenir la liberté d'user de leur corps.
Elle rejoint d'autres campagnes qui associent l'avortement à un génocide, en raison de la prévalence de l'avortement dans les groupes afro-américains. L'idée de race s'impose alors, évitant de penser les inégalités sociales criantes qui mène à une sur-représentation des avortements dans ces populations. Les réflexions sur la pénalisation de la misère (voir Loïc Waquant) pourraient ici se transformer en une racialisation de la misère...
Une telle campagne – par son coût – atteste de la force dont disposent les lobbys anti-avortement aux Etats-Unis. Elle indique également que le racisme fonctionne comme argument. Dans le combat entre les "forces du bien" et "les forces du mal" d'une Amérique d'un autre âge, l'Autre est diabolisé (dans tous les sens du terme).
Ici, l'autre est l'Afro-américaine qui incarne le mal, par l'assimilation de l'avortement au meurtre. La petite fille en robe rose et au noeud dans les cheveux est présentée comme une survivante du corps des femmes noires. Dans un pays où la ségrégation raciale existait encore il y a moins de cinquante ans et où les droits civiques en faveur des Afro-américains ont été acquis de haute lutte, cette association est loin d'être anodine.
Elle joue sur les représentations les plus profondes du racisme qui associe les Noirs à une sexualité non contrôlée, bestiale, primitive... et au refus d'en assumer les conséquences. La campagne s'appuie donc sur les sentiments racistes les plus enfouis pour combattre un autre droit, celui à l'avortement, conquis lui aussi par les femmes ayant combattu pour obtenir la liberté d'user de leur corps.
De telles campagnes rappellent que rien n'est jamais acquis et que la liberté comme le respect des différences, même inscrits dans le droit, sont toujours soumis à un combat pour des valeurs.
Ici, ce combat, esthétisé pourtant par une agence publicitaire, prend la forme d'un coup bas.
Pour en savoir plus sur la campagne et sur les réactions légitimes qu'elle a suscitées:
voir sur MS
une série d'articles à lire également:
par Lisa Wade, dans Sociological images
Re-framing the abortion debate
Racializing the abortion debate
Racialized abortion campaigns and rethinking choice
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